
AGRESSIVITÉ VERBALE ET RESPECT MUTUEL
UNE MISE AU POINT NÉCESSAIRE
INTRODUCTION
Je prends aujourd’hui la plume pour faire une mise au point importante.
Depuis l’ouverture de la page Instagram des « Pensées de l’homme plume », j’ai reçu plusieurs messages privés particulièrement violents, agressifs, voire haineux, qui pointent tous mon utilisation du terme « Aspie » dans mon message de bienvenue.
Ce matin encore, deux commentaires de ce type ont été postés sous la publication « incriminée ». Cela m’oblige à clarifier un certain nombre de points, en espérant qu’ils seront entendus avec discernement.
Ce blog se veut un espace sûr, accueillant et sécurisant.
Cela signifie que toute personne y est la bienvenue, tant qu’elle respecte les règles élémentaires de courtoisie et de bienveillance.
Cela vaut pour moi, pour les personnes qui témoignent ici, et pour toute personne lisant ou interagissant avec ces publications.
Je rappelle donc clairement que tout message agressif, violent, discriminant, haineux ou dévalorisant sera immédiatement signalé et son auteur bloqué.
Je ne laisserai aucun comportement abusif envahir cet espace.
Mais ce blog est aussi – et surtout – un espace de co-création.
Vos messages, vos commentaires, vos réactions, vos échanges avec moi sont le cœur battant de ce projet.
Ce sont eux qui nourrissent les thèmes que j’aborde, et m’aident à en trouver les angles. J’apprends énormément grâce à vous.
Vos interactions m’apportent plus de compréhension, plus de nuances, m’inspirent les sujets que je souhaite traiter, et me permettent de mieux les explorer.
I. LE TERME « ASPIE », POURQUOI JE L’AI UTILISÉ
Puisque l’usage du mot « aspie » semble avoir concentré beaucoup de tensions, il me paraît important de répondre avec précision et nuance. Comme beaucoup de personnes diagnostiquées tardivement, j’ai été longtemps familier – comme une grande partie du public – avec l’expression « syndrôme Asperger », sans en connaître l’histoire trouble.
Ce n’est qu’au fil de mes recherches et de mes formations que j’ai pris connaissance des liens réels, mais complexes, entre Hans Asperger et le national-socialisme. Il est établi qu’il a collaboré, sans être pour autant un membre officiel du parti. Certains historiens nuancent son implication, d’autres la dénoncent fortement.
Quoi qu’il en soit, Asperger reste l’un des pionniers, avec Leo Kanner, dans le domaine des recherches sur l’autisme infantile (du grec ancien autos, parce que Kanner pensait que ces sujets se complaisaient dans la solitude) et le premier, à ma connaissance du moins, à avoir constaté une surefficience intellectuelle chez ses patients qu’il appelaient « ses petits professeurs ».
Cependant, utiliser aujourd’hui le mot « aspie » n’équivaut pas à célébrer ou réhabiliter Hans Asperger. Dans mon cas, c’était une référence affective et respectueuse à la bande dessinée « L’Aspinaute » de Laura Bresson, qui m’a profondément aidé à comprendre certaines facettes de mon fonctionnement.
Et donc, doit-on brûler cette bande dessinée au motif que le mot « Aspie » figure dans le titre ? Doit-on censurer toute œuvre qui utilise ce terme ?
Je comprends qu’on puisse être sensible à cette question.
Ce qui me choque, ce ne sont pas les désaccords – je les accueille volontiers quand ils sont formulés avec respect, car la confrontation d’idées fait avancer la pensée.
Ce qui me choque, ce sont les attaques personnelles violentes. Être traité d’« admirateur du 3e Reich » ou d’« apologiste de la collaboration » parce que j’ai écrit « aspie » dans un texte est non seulement faux, mais profondément insultant et sidérant de bêtise.
II. DIALOGUER OUI, AGRESSER NON
Plusieurs personnes ont pris le temps de m’écrire avec bienveillance, parfois en désaccord, mais dans une volonté de comprendre ou de partager un autre point de vue. Je tiens à les remercier sincèrement. Ces échanges sont précieux. Ils prouvent que nous pouvons penser différemment sans chercher à nous détruire mutuellement.
Nous ne serons pas toujours d’accord, et c’est très bien ainsi. Je ne suis pas ici pour construire un mur entre les « gentils autistes » et les « méchants neurotypiques ». Je suis ici pour favoriser la compréhension, et faire avancer la réflexion collective sur ce qu’implique vraiment le TSA dans nos vies et dans nos relations. Les personnes allistes sont également les bienvenues sur cette page.
III. LES COMPORTEMENTS QUE NOUS DÉNONÇONS NE DOIVENT PAS DEVENIR LES NÔTRES
Je suis surpris – et peiné – que ces personnes autistes, pourtant critiques des comportements invalidants de certains neurotypiques, reproduisent exactement les mêmes attitudes : jugements rapides, accusations, invectives, essentialisation, procès d’intention. C’est une pente dangereuse.
Ces réactions peuvent être déclenchées par un mot ou une formulation, sans aucun effort de contextualisation ou de compréhension des intentions de l’autre. Cela débouche souvent sur une réponse épidermique, violente, qui laisse l’autre dans un état de sidération.
Et lorsque la personne visée tente de clarifier ou de s’expliquer, elle est parfois accusée de manipulation ou rejetée froidement.
Je pose ici trois questions simples :
- Et si nous regardions ce que cela réveille en nous ?
- L’autre est-il la cause de cette émotion, ou seulement son déclencheur ?
- Le mot que j’ai lu m’a-t-il vraiment offensé, ou a-t-il réveillé une douleur ancienne ?
Je ne parle pas ici d’excuser des propos ou des actes malveillants. Mais de responsabilité personnelle. De la capacité à ne pas projeter sur l’autre ses blessures, et à ne pas tout interpréter en termes de guerre, de pouvoir ou d’attaque.
IV. TSA NE VEUT PAS DIRE IRRESPONSABILITÉ
Je souhaite rappeler quelque chose de fondamental : le diagnostic TSA ne justifie pas tout. Il ne peut pas devenir une excuse à tous les comportements, ni une protection contre toute remise en question.
Certaines personnes se réfugient derrière leur diagnostic pour éviter toute confrontation à leur part de responsabilité. Elles en viennent à justifier des abus, des agressions verbales ou des comportements destructeurs, en se retranchant derrière un « je suis autiste » supposé tout excuser.
Ce type d’attitude est problématique. Il revient à essentialiser la personne, à se résigner à ses propres excès, voire à en faire une fatalité.
Se définir, ce n’est pas se limiter. Et comprendre, ce n’est pas excuser.
De nombreux professionnels de santé mentale insistent aujourd’hui sur un point essentiel : le TSA est un spectre, large, très large. Il n’y a pas un autisme, mais autant d’autismes que de personnes autistes.
Il y a bien sûr des tendances communes, dont je parle abondamment ici. Mais chaque personne est unique dans son rapport au monde, dans ses besoins, ses blessures et ses potentiels.
Réduire une personne à son diagnostic, c’est la priver de liberté.
C’est, paradoxalement, l’enfermer dans une case au lieu de lui offrir des clés pour mieux se comprendre.
CONCLUSION
Ce blog est un espace pour apprendre, réfléchir, se reconnaître parfois, se remettre en question aussi.
Il ne sera jamais un espace de haine ni de règlements de comptes. Je suis ici pour faire ma part dans cette aventure humaine complexe qu’est la neurodiversité.
J’assumerai toujours mes maladresses quand elles existent. Mais je n’accepterai jamais d’être réduit à un mot, une projection ou une insulte.
Mon objectif n’est pas de parler au nom de qui que ce soit. Je parle depuis mon expérience, avec mes mots, mes limites, et mes ressources.
Ce blog me ressemble. Il est imparfait, en construction, parfois disruptif.
Mais il est sincère.
Et je souhaite que celles et ceux qui s’y reconnaissent s’y sentent chez eux – à condition d’y venir avec respect.
